Vibrant

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« On pense souvent qu’il faut des oreilles pour percevoir la musique, mais ce n’est pas vrai. Il y a les autres sens », remarque Enrico Raso, président de l’association Vedanity Affair. Avec ses ateliers « Percevoir la musique différemment », il invite les participants à toucher la musique, à la voir et bientôt, il mettra même leurs voix en images. 

On pense aussi que ses ateliers s’adressent à un public sourd ou malentendant. « Bien au contraire, même si les sourds et les entendants peuvent s’y retrouver. Ils s’adressent avant tout à ceux qui n’ont pas de problème de surdité. J’aime beaucoup amener les entendants dans l’univers des sourds », précise-t-il. 

Avec son association Vedanity Affair, il intervient dans les centres sociaux de Moulins, Lille Sud et de Fives, mais aussi à l’espace santé du Faubourg de Béthune, à l’Aéronef ou encore au Flow. En fonction de l’âge du public, il adapte son propos : plus scientifique avec les adultes où il parle cymatique (étude du son visible) et ludique avec les plus jeunes. « Ça marche très bien auprès des enfants de 18-22 mois et de leurs parents. » 

Rendre visible l’impalpable

Equipé d’un tonoscope, Enrico étale de la poudre sur une plaque métallique posée sur une enceinte. Le son interagit avec la matière et crée des formes géométriques devant les yeux étonnés du public. Autre expérience, mais cette fois, avec du liquide, et des participants qui « touchent » les vibrations. « Selon l’intensité des fréquences que j’envoie, les formes changent. J’aime bien que les participants ne repartent pas juste avec des images plein la tête, alors, je leur fais fabriquer leur propre tonoscope pour qu’ils poursuivent l’expérience chez eux en produisant des formes avec leur propre voix. »

Passionné de musique, Enrico Raso est né en Calabre, au « sud de la botte », dans le petit village de San Martino. C’est le handicap de son père atteint de surdité qui lui a donné l’idée de ces ateliers. 

« Un jour, j’étais en train de faire de la MAO (musique assistée par ordinateur), très fort, et mon père se reposait dans la pièce d’à côté. À un moment, il toque à ma porte et me demande de baisser ma musique. Je l’ai regardé et je me suis dit : ou il a fait semblant d’être sourd pendant tout ce temps, ou comme ça ne peut pas être le niveau sonore qui l’a réveillé, ce sont les basses fréquences qui ont fait vibrer son canapé ! » 

Il décide alors d’étudier la musique, ou plutôt de la disséquer et part à Milan faire des études d’ingénierie du son à la SAE, une école dont le diplôme est reconnu internationalement. « Mon objectif était de devenir ingénieur du son à Londres, le lieu par excellence où faire de la musique. »

Son frère vivant à Loos, Enrico a d’abord fait un crochet par la capitale des Flandres pour travailler et se faire un peu d’argent avant d’atteindre sa destination finale. « Quelques mois après mon arrivée, j’ai eu la chance de monter sur la scène du Flow lors du festival Hip Open Dance. Pendant toutes ces années, ça n’avait pas été possible dans mon pays, alors, je me suis dit que Lille était vraiment ma ville. » 

Neuf ans plus tard, Enrico n’est pas encore prêt à quitter Lille. Technicien lumière polyvalent au Théâtre du Nord, à la maison Folie Wazemmes et à l’Opéra, il veille au bon déroulement des spectacles. Il dit avoir encore plein de choses à faire ici. Comme développer ses ateliers pour continuer à rendre visible l’impalpable. 

Par Sabine Duez

. Plus d’infos : vedanityaffair@gmail.com / 07 84 62 26 02.